association animation de l’arche

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Vendredi 7 juin 2013
Jardin de l’Artiste à Eguilles
Reportage
de notre envoyée spéciale :
Marie-Thérèse Ayache
Il est 15h, il fait beau ! En route pour Eguilles ! Après une météo très capricieuse en mai, nous allons déambuler dans le jardin « secret » de Max Sauze, et rencontrer cet artiste contemporain provençal, dont l’œuvre est très riche. Il s’est illustré, plusieurs fois dans le château-Musée d’Edgar Mellick, à Cabriès, au Parc Jourdan, à la Cité du Livre et dans l’Atelier Cézanne à Aix-en-Provence. Ce jardin, qui a ouvert son portail au public, pour la première fois, en 1989, a obtenu en 2005 le label « Jardin remarquable » décerné par le Ministère de la Culture et de la Communication.
Nous nous sommes retrouvés dans un petit groupe d’une dizaine de personnes, devant l’entrée d’une petite vitrine : la porte est sans poignée ! Dans l’embrase, une plaque en marbre supporte quatre sonnettes, sans aucune indication de nom ! Le ton est donné : l’artiste ne manque pas d’humour ! Plouf, plouf ! Sans hésiter, Yves appuie tour à tour, sur chacune des quatre et une dame vient nous ouvrir : Madame Sauze nous accueille en nous faisant entrer dans « la galerie-boutique », emplie d’œuvres du maître : sur des étagères, sur les murs, sur des bahuts, sur le sol et même au plafond. L’artiste travaille dans de nombreux domaines techniques, après avoir commencé par la peinture classique. Ses dernières œuvres sont principalement en trois dimensions afin d’explorer l’espace et utilisent plus particulièrement le fil de fer soudé.
Nous passons dans le salon puis, nous arrivons dans le jardin, derrière, calme, lumineux malgré les feuillages de grands arbres. Nous entrons dans « un poème » ! Comme des spots de spectacle, les rayons du soleil semblent éclairer, çà et là, des sculptures très épurées sortant du sol, vestiges de cyprès, mis en valeur par la touche de couleur : bleu-violet, qui contraste, nous explique l’artiste, avec les couleurs naturelles du jardin : le jaune, le vert, l’ocre rouge, la terre d’ombre (des sculptures en fil de fer). Les sentiers serpentent autour de massifs d’arbustes, contournent des racines de yuccas très tourmentées, se contorsionnant sur le sol. Nous posons nos regards partout : sur le sol, devant nous, derrière nous, en l’air !
A chaque détour, nous découvrons, émerveillés, des pignes de pin, sagement enfilées sur des tiges de fil de fer superposées entre deux branches de cyprès. La spirale d’une sculpture de coquilles d’escargots de Bourgogne essaie de rejoindre une branche plus haut. Un mur de lierre très capricieux et fourni, tente de s’approprier le sol devant lui, mais, sous la poigne ferme de l’artiste, s’est replié sur lui-même et remonte à l’assaut du mur ! Plus loin, une forêt de stalagmites nous paraît très étrange : sur des tiges d’armature de béton verticales d’un mètre environ, l’artiste a enfilé des pages et des pages et des pages de livres « qu’on ne lit plus », toutes retaillées en carrés et disposées en quinconce, de manière à laisser entrevoir les pointes et quelques mots : la pluie, le vent, les poussières, les coulures d’encre posent leur empreinte et modèlent à leur guise ces concrétions qui, ainsi prennent une forme naturelle de stalagmite ; ce sont « des feuilletés d’écriture ». Plus loin, encore, le lierre retombant, au-dessus de nos têtes, nous invite à entrer dans « une petite chapelle », au centre de laquelle « un gros pomélo » tout en limaçons, écarte son écorce sur des tiges métalliques recourbées, garnies aussi de limaçons. Dans « une autre chapelle », « un retable », adossé au mur nous expose sa structure de fils de fer emprisonnant des rouleaux et des rouleaux de papiers journaux ou autres, sagement ordonnés et superposés. Au fond du jardin, sur le sol, un bassin octogonal : « la Bascine », -« bassin-piscine »- nous expose sa maçonnerie en mosaïque de pièces de monnaie inusitées (des francs, principalement) : certaines sont entières, d’autres coupées en deux moitiés distinctes. Plus loin, encore, une sculpture aérienne très légère, posée à l’ombre d’un arbuste, dévoile ses composants : ce sont d’autres pièces de monnaie non entièrement coupées et écartées en ailes d’anges. Plus bas, l’extérieur des murs d’une remise recèle des piles et des piles et des piles de livres, d’annuaires téléphoniques (coupés dans la largeur), qui font contre mauvaise fortune, bon cœur, avec les éléments du temps... Sous le tilleul, de grands tubes verticaux, « en grillage à poule », emplis de papiers froissés, s’organisent en serpentins, font une ronde ou se rangent en colonnes, comme les gymnastes entrant dans le stade, assemblés « en un hasard créatif » ; là encore, les éléments du temps vont « se les approprier » et les signer de leur griffe !
Nous n’avons plus envie de nous en aller ; nous revenons vers l’artiste qui nous parle un peu de sa démarche artistique : « Mon engagement artistique, depuis le début de ma carrière, en 1960, à Alger, se construit dans une démarche qui s’inspire du monde végétal. L’organisation spatiale de type « sculpture » par des cellules plus ou moins identiques, donne naissance à des formes par multiplication. L’aléatoire est contrôlé. J’ai nommé ces formes « des lichens ». Il s’agissait, cette fois-ci de construire « une algue de jardin ». Pour tout savoir sur le Volvox...
Quand le plasticien se fait poète...
« Mes arbres sont étonnants,
Ils me traduisent les messages du vent.
J’écoute,
J’entends...
Mes pierres, rouges de honte,
Se camouflent.
Je les rassure,
Je leur parle,
Elles vont mieux, se stabilisent un temps,
Puis, à nouveau muettes, disparaissent.
Mes arbres sont conciliants,
Ils se prêtent à mes jeux.
Je les répare,
Les rafistole,
Ils ont besoin qu’on s’occupe d’eux.
Mes pierres font des progrès,
Parfois, refont surface …..
C’est bon signe,
Le printemps n’est pas loin ! »
Max SAUZE (1992)